Marketing de contenu 3.0 ou comment mettre en place l’approche business média, l’exemple de Collective 

approche business media
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Ces 20 dernières années, le marketing de contenu a pris une dimension démesurée.

Sur Google, on trouve des millions d’articles qui racontent la même chose. Des milliers de marques qui essaient de tirer leur épingle du jeu pour attirer les visiteurs sur leur site. 

La course à la position zéro n’a jamais été aussi folle. Chaque expert amène son opinion sur la meilleure stratégie à adopter. 

J’évolue depuis bientôt deux ans dans ce milieu et déjà, je me pose la question du sens de tout ça. 

Ne nous voilons pas la face, le consommateur sait aujourd’hui reconnaître un article écrit pour “lui apporter de la valeur”, mais qui finalement, est une pub déguisée pour la marque. 

En 2022, ne peut-on pas faire mieux qu’écrire un énième article pour nourrir Google ? 

Je pense que nous devons revenir aux fondamentaux du marketing, offrir de la qualité avant de faire de la quantité, nous soucier des problèmes de notre cible avant de penser à notre CA. 

Certaines entreprises ont déjà enclenché cette réflexion et développent une stratégie de contenu innovante : elles ont créé leur média.  

Je pense par exemple à LiveMentor avec son magazine bimestriel destiné aux entrepreneurs ou à Welcome To The Jungle, le média dédié à l’emploi.

Alors j’aurais pu dans cet article, prendre l’exemple de WTTJ. C’est un modèle de réussite évident. Même si l’on ne fait pas partie du cœur de cible, on a tous vu passer sur Instagram ou LinkedIn, une vidéo ou un article du média.

Mais mon objectif n’est pas de vendre du rêve et une success-story à la Facebook. 

Je souhaite démontrer pourquoi il est important aujourd’hui pour une marque de tendre vers cette approche. Et surtout, comment, à votre niveau en partant de zéro, vous pouvez mettre en place une stratégie marketing  business média

Alors pour amener du concret à ma réflexion, j’ai analysé la stratégie d’une startup qui commence à se faire entendre depuis quelques mois dans l’écosystème freelance : Collective. 

Cerise sur le gâteau, Paulina Jonquères d’Oriola, la Lead Content Manager de Collective, a accepté de répondre à mes questions.

Alors c’est parti, je vous emmène en route vers le marketing de contenu 3.0.

Présentation de Collective

Avant de me lancer dans une analyse poussée, une présentation de notre cobaye s’impose. 

Collective, startup née début 2021, est une plateforme de mise en relation des entreprises avec des collectifs de freelances. 

Elle s’est construite autour de l’idée que si le freelancing connaît un essor sans précédent ces 10 dernières années, les collectifs de freelances sont la prochaine étape de ce développement. 

Selon leur étude publiée en 2021, déjà 20% des indépendants travaillent en équipe et “la tendance voudrait qu’un actif sur deux travaille dans un collectif d’ici 2040. La France pourrait alors compter plus de 500 000 collectifs.” 

Un marché que la startup compte bien dominer grâce à sa solution SaaS qui permet aux freelances de s’organiser en équipe et de facturer sous une même entité tout en gardant leur indépendance. 

La startup a donc deux cibles distinctes : les clients qui déposent des projets sur la plateforme et les collectifs de freelances et de façon plus large, les freelances qui pourraient former leur collectif.

headline collective cible client
Headline pour la cible client
headline collective cible freelance
Headline pour la cible freelance

En 2021, les trois cofondateurs sont seuls aux commandes et communiquent principalement sur LinkedIn. La stratégie fonctionne plutôt bien, ils regroupent une audience d’une dizaine de milliers d’abonnés, de quoi faire entendre leur voix.

Mais pour passer au stade supérieur et soutenir leurs ambitions de développement, il faut aussi accélérer au niveau du contenu ! 

Après la levée de fonds à la fin de l’année 2021, l’équipe grandit passant de 3 personnes à 25 en avril 2022. L’équipe marketing se structure et l’arrivée de Paulina Jonquères d’Oriola va donner l’impulsion nécessaire à la mise en place de la stratégie business média de Collective.

Comprendre l’approche business média

Lorsque je commence mes recherches, je note tout de suite la particularité dans l’équipe marketing de Collective. Paulina Jonquères d’Oriola, la personne à la tête du contenu n’a pas un background marketing. C’est une ancienne journaliste, elle a écrit pendant 10 ans pour divers médias traditionnels. 

Plutôt surprenant pour une startup non ? 

Eh bien, non, pas dans une approche business média, bien au contraire, c’est l’une des clés du succès selon moi. 

Pendant notre échange, Paulina confirme mon hypothèse : “Je suis arrivée avec mon expérience de journaliste, après un passage chez WTTJ et des piges pour des startups comme Swile ou Maki. Quand ils m’ont choisie, j’ai bien dit que je ne faisais pas du marketing à la base. C’est un monde qui ne m’est pas totalement étranger puisque l’on parle de contenu, mais je ne m’étais jamais présentée en pro du marketing.”

Et lorsqu’on lit les articles du blog de Collective, on comprend vite la différence entre une approche “classique” qu’aurait sûrement apportée un profil Head of content classique et l’approche proposée par Paulina. 

On est loin des articles SEO à faible valeur ajoutée. On trouve des contenus longs, dépassant les 10 minutes de lecture qui proposent une réflexion au lecteur. 

À l’image de cet article écrit par Valentin Decker : “Et si votre collectif était une DAO… à quoi ressemblerait-il ?”. 

Personne ne va taper la requête “collectif DAO” sur Google. Cet article a donc très peu de chances de générer du trafic grâce à ce levier. 

Mais ce n’est pas son objectif. 

L’article est passionnant pour ceux qui pensent à fonder un collectif, qui cherchent des solutions pour s’organiser sans créer de hiérarchie… Mais attendez ?! C’est pile l’une des problématiques de la cible de Collective ça non ? 

Voilà, vous avez compris pourquoi ils ont publié cet article. 

Moi-même, je suis en train de créer un collectif et je peux vous assurer que c’est pas gagné ! Cet article a amené  plein de réflexions très intéressantes sur le sujet. Il participe à créer une relation de confiance avec la marque : ils comprennent mon problème, ils vont même au-delà. Alors bien sûr, je me tourne vers eux pour construire mon collectif !

Cette stratégie repose avant tout sur la qualité du contenu et la relation que l’on va créer avec son audience. Il s’agit de devenir une référence dans son domaine. 

L’approche business média ne change pas les fondamentaux du marketing, elle les remet au centre. Je pense qu’à vouloir faire plaisir à Google ces dernières années, nous en avons oublié l’essentiel parfois : le contenu doit répondre à la problématique de notre cible. 

Alors bien sûr, n’importe quel responsable SEO vous dira que ses contenus ont pour unique but de répondre aux besoins de la cible. La recherche de mots-clés a vocation à trouver les requêtes que tapent les internautes. Alors s’ils tapent ces requêtes, c’est bien que c’est l’une de leurs problématiques.

Oui, mais non. 

Bien sûr, certaines requêtes sont évidentes. D’ailleurs, chez Collective, l’article “Comment créer son collectif freelance ?” est très bien positionné. Il est important d’avoir ce genre d’articles. 

Mais, là où l’approche uniquement SEO atteint sa limite, c’est lorsqu’on produit des dizaines d’articles juste pour poncer un sujet (désolé, le mot n’est pas très joli, mais je n’en vois pas d’autres qui illustrent mieux l’idée). 

Dans notre approche business média, on va donc aller chercher des sujets sur lesquels nous devons bien sûr être présent d’un point de vue SEO, mais aussi des sujets inspirationnels ou d’actualité qui intéressent notre cible.

L’enjeu est de l’inspirer, de la faire réfléchir, de lui apporter des informations utiles à son business, de nourrir sa culture générale… 

Collective ajoute même un angle en proposant des articles “Inside Collective” pour le côté build in public. On trouve donc sur le blog un article écrit par le cofondateur Jean de Rauglaudre “L’entrepreneuriat après McKinsey, c’est tricher ?”, ou bien celui dans lequel Paulina raconte son parcours “De journaliste à Content Manager en startup, il n’y a qu’un pas… que j’ai franchi” et d’autres sont à venir. 

La stratégie business média repose donc sur la qualité et la pertinence du contenu pour notre cible. L’information est traitée avec un angle plutôt journalistique et on ne fait pas de pub déguisée. 

Mais alors, comment construit-on une telle stratégie ?

Construire son business média

Je l’ai dit plus haut, il ne s’agit pas de révolutionner le marketing. Alors les étapes sont sensiblement les mêmes que pour toute stratégie, c’est surtout l’angle d’approche qui diffère.

Apprendre à connaître sa cible

Tout commence bien sûr avec une étude approfondie de sa cible. Quelles sont ses problématiques, les choses qui l’empêchent de dormir la nuit ? Comment s’informe-t-elle ? Est-ce qu’elle aime plutôt lire des articles, écouter des podcasts, regarder des vidéos ? 

En général, un mélange de tout ça. Mais il vous faudra choisir un médium à exploiter en premier. Vous ne pourrez pas vous éparpiller au risque de perdre la qualité. 

Et la qualité est le pilier essentiel de l’approche média. Oui, je me répète, mais c’est pour que vous compreniez bien.  

Si vous ne savez pas où trouver ces informations, regardez les posts LinkedIn des influenceurs dans votre domaine et leurs commentaires, cherchez dans les groupes Facebook, organisez des interviews de votre cible : contactez une dizaine/centaine de personnes et posez-leur des questions, demandez-leur ce qu’ils veulent voir/ce dont ils ont besoin.

Collective a commencé par mener une étude sur les freelances au début de l’année 2021 à leur création. Ils ont compris les problématiques profondes de milliers de freelances. Ils savent parfaitement quels sont les sujets qui importent. 

Et aujourd’hui, au quotidien, ils s’intéressent à ce que pense leur cible. Pendant notre appel, Paulina en a profité pour recueillir mon avis sur les articles déjà parus et sur le genre d’articles que j’aimerais voir… Elle n’a pas loupé l’occasion de me questionner, car je suis dans son cœur de cible !

Jauger la concurrence, faire mieux et différemment

Une fois que vous avez compris votre cible, vous devez comprendre la façon dont vos concurrents s’adressent à elle et les solutions qu’ils apportent. 

Il s’agit alors de faire différemment, mais surtout mieux. La qualité doit être votre obsession

Si vous décidez de faire des articles, trouvez des axes qui sont peu ou mal exploités. Ne recopiez pas ce qui existe déjà sur Google. On a déjà des milliers d’articles qui racontent la même chose. 

Trouvez l’angle qui changera la donne. 

Écrivez l’article qui fera dire à votre cible “wow, voilà un article de fond qui m’a permis d’apprendre quelque chose/qui m’a fait réfléchir.” 

Si vous faites des vidéos, faites-les bien. Trouvez des professionnels dans ce milieu et réalisez des vidéos au-dessus de ce qui se fait actuellement sur votre marché. 

C’est de cette façon que vous ferez la différence, et petit à petit, gagnerez la confiance de votre cible. 

Collective est plutôt seul sur son marché. Il n’existe pas de plateforme pour les collectifs de freelances, tout comme il n’existe pas vraiment de médias pour les freelances. 

D’un côté on trouve les plateformes comme Malt qui propose du contenu très pratique, clairement produit pour le SEO, et de l’autre, les médias type Maddyness ou Les Échos Start qui s’adressent à la cible clients. 

Collective choisit un positionnement au milieu. “Du fait qu’on n’est pas un média traditionnel, on ne s’exprime pas de la même façon. On n’a pas trop de concurrence dans notre domaine. On va s’inspirer des licornes et de la presse anglo-saxonne pour faire des articles beaucoup plus actionnables” me confie Paulina.  

Définir le plan de bataille, sa stratégie

Vous avez toutes les données, maintenant, il faut prendre les décisions.

  • Définissez le médium sur lequel vous souhaitez commencer.
  • Établissez 3 à 5 thématiques sur lesquelles vous allez créer du contenu.
  • Dressez un calendrier éditorial : c’est l’outil qui va permettre de produire du contenu régulièrement sans stress.
  • Produisez les contenus : il y a un moment pour réfléchir et un moment pour exécuter.

NB : vous remarquez que la stratégie ne change pas vraiment d’une approche classique. Alors peut-être que vous mettez en doute la différence de l’approche que je propose. En effet, on ne révolutionne pas la manière de mettre en place la stratégie, la différence réside dans le contenu lui-même. 

À son arrivée chez Collective en avril, Paulina a pris un mois pour établir la stratégie puis les premiers articles étaient publiés. “La plupart des articles ont été produits en externe. On a adopté une stratégie de rédaction avec des experts : Laetitia Vitaud, Valentin Decker, Flavie Prévot, Margaux Roux… C’est des gens qui vont nous offrir du contenu intéressant dans le fond et qui en plus, sont de bons ambassadeurs sur les thématiques qui nous intéressent” raconte Paulina.

Une stratégie très intéressante sur laquelle je voudrais m’arrêter un instant. 

En plus d’optimiser la qualité de leur contenu, en faisant appel à des prescripteurs, Collective a optimisé la distribution. Cela a permis à la startup de gagner en notoriété rapidement. Les personnes que Paulina cite bénéficient toutes d’une belle audience sur LinkedIn et sont reconnues dans leur domaine.

Aller chercher des prescripteurs dans votre domaine vous permet d’élargir votre audience à moindre effort

Développer et ajuster

L’approche business média demande du temps et de la patience. En fonction du budget que vous pouvez y consacrer, vous irez plus ou moins vite.

Mais vous devez toujours garder à l’esprit que la qualité doit primer à tout prix sur la quantité. Oui, je répète encore.

Paulina m’a confirmé que l’idée de passer au multiformat était bien sûr dans les tuyaux chez Collective, mais l’équipe reste prudente. “On a besoin de créer les sujets de bases autour des problématiques du collectif. Ensuite, on verra pour adapter en vidéo ou en podcast. Mais toutes les startups sont dans le même cas, il faut faire des choix.”

D’autre part, les objectifs de la stratégie business média doivent suivre les objectifs de l’entreprise.

Chez Collective, les premiers articles sont très orientés pour la cible freelance avec des sujets inspirationnels comme celui sur le blurring, le brouillage entre la vie perso et pro en freelance. Lors de mon analyse, j’avais d’ailleurs identifié que la cible principale de leur stratégie était celle des freelances. 

Pendant notre échange, Paulina m’a confirmé que c’était le cas dans un premier temps. Mais, comme toutes les startups, Collective a besoin de croissance à court terme, et cela passe par amener plus de projets clients sur la plateforme. La stratégie média doit donc se réorienter pour toucher plus la cible client. 

Ce qu’il faut retenir ici c’est qu’il est essentiel d’itérer sans cesse. L’approche est nouvelle, il n’existe pas de métriques spécifiques à suivre pour savoir si oui ou non votre stratégie fonctionne. Bien sûr, vous suivez le nombre de pages vues, mais difficile de quantifier le nombre de leads que cela vous ramène. 

C’est une stratégie long terme, qui amène à créer une relation privilégiée avec votre cible. 

Faites-le bien et il est possible que dans quelques années vous soyez le Welcome To The Jungle de votre secteur. C’est tout ce que je vous souhaite !

Et pour la suite ?

Une fois la première brique de contenu posée et bien collée, vous pouvez poser la seconde brique. Pendant notre conversation, Paulina m’a confié les idées de développement pour Collective, mais ces moments tenaient plutôt du off. 

Alors j’ai réfléchi à quelques pistes de développement, que vous pourriez vous aussi peut-être mettre en place dans votre business média. C’est aussi des idées qu’en tant que lectrices de Collective, j’aimerais voir dans le futur ! 

Créer une newsletter à destination des freelances

Les avantages d’une newsletter sont nombreux, à commencer par créer un lien particulier avec son audience, si vous le faites bien, ce rendez-vous peut-être attendu avec impatience chaque mois. 

De plus, cela permettrait à Collective de maîtriser un peu mieux la diffusion de ces articles, ils sont selon moi aujourd’hui trop dépendants de LinkedIn. Ce n’est jamais bon de dépendre d’un algorithme.

On pourrait même penser à partager des offres de mission dans cette newsletter pour stimuler les freelances “latents” à créer leur collectif et se positionner. 

Enfin, partager des exemples de missions déjà réalisées par les collectifs serait une belle source d’inspiration.

Créer un podcast d’interviews de collectifs

Oui, je suis une fan de podcast… On pourrait aussi penser ce format en vidéo, mais je n’aime pas YouTube, alors je choisis le podcast ! Je crois aussi que c’est un médium bien adapté à la cible à l’image des podcasts autour du freelancing qui rencontrent déjà un grand succès (Tribu Indé, Young, Wild & Freelance, La Cohorte…).  

Pendant une trentaine de minutes, chaque épisode se concentrerait sur une thématique précise autour du collectif (trouver ses partenaires, choisir la forme juridique, créer l’image de marque de son collectif…).

Conclusion

Je pense avoir bien insisté sur ce point, vous l’aurez donc compris, l’approche business média repose sur la qualité du contenu que vous proposez à votre audience. 

Il s’agit de délaisser les injonctions de Google pour avant tout créer des choses innovantes. Les visites sur votre site viendront d’abord des réseaux sociaux, du bouche-à-oreille, puis certainement du SEO. 

Non, sûrement pas toutes les visites, mais qu’importe. Votre approche sera assez qualitative pour développer une vraie relation avec votre cible. 

Elle cherchera votre contenu et non pas le premier article positionné sur Google. 

Elle tapera votre nom dans la barre de recherche plutôt que sa requête. 

Si je sais que je trouverai une réponse qualitative sur votre site, alors pourquoi irais-je demander à Google ? 

Voilà, votre objectif dorénavant n’est plus de plaire à Google, mais de plaire à votre cible. 

Certains me diront que c’était déjà le cas avant. 

J’étais rédactrice SEO, et je crois que c’est faux. 

Un bon rédacteur SEO ne va pas questionner sa cible pour apprendre à la connaître, il analyse les premières pages des résultats de recherche pour faire “pareil en mieux”. 

Je préfère désormais mon rôle de conceptrice-rédactrice, à mi-chemin entre le marketing et le journalisme, j’écris des articles plutôt éditoriaux. Je fais des recherches sur une thématique, je rencontre des experts sur le sujet, je réfléchis et j’apporte une opinion. Je propose une réflexion au lecteur.

Essayez, vous verrez, c’est gratifiant de produire un tel contenu !

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